Je ne pars pas pour fuir mais pour découvrir, m'enrichir et vous offrir ce que j'ai vu....


Nouvelle-Calédonie - Lifou

01/05/2013 18:08

Nous arrivons au gigantesque aéroport international d’Ouvéa et il semble qu'il y ait une dispute ou un désaccord. Un agent répète en boucle, l'heure c'est l'heure. De l'autre côté un touriste devient hystérique en lui répétant que l'avion était en retard. Si l'on s'intéresse à la situation d'un peu plus près il y a de quoi rire. Le vol pour Nouméa avait deux heures de retard. Les voyageurs apprenant la nouvelle se rendirent logiquement deux heures plus tard à l'enregistrement. En revanche l'agent qui s'occupait d'enregistrer les bagages ne changea rien à ses horaires. C'est ainsi que les voyageurs qui arrivèrent deux heures plus tard pour enregistrer leurs bagages trouvèrent un stand fermé. Il y a de quoi devenir fou.
J'aurais voulu vous filmer la scène mais les kanaks ne sont pas des gens cool lorsqu'ils sont énervés. Autrement dit ça chiait des bulles en l'air comme dirait madame Durand, reine du hameau de la route blanche.

Un petit avion se pose, et nous pouvons lire Air Loyauté. C'est une compagnie privée qui effectue des vols entre les îles loyauté, Ouvéa, Lifou, Maré et Tiga. Il n'y a que 9 places dans l'avion. Et aujourd'hui nous serons les seuls passagers de ce vol. Un jet privé rien que pour nous, la classe... Un mec débarque avec un chariot sur lequel il n'y a qu'un seul bagage. C'est le nôtre. Le pilote vient nous accueillir. Il ne vérifie même pas les billets puis nous accompagne jusqu'à la porte.

La porte du cockpit est ouverte. Nous procédons au comptage, 1, 2, le compte est bon, décollage ! Nous effectuons le vol à basse altitude ce qui permet de découvrir la côte de l'île. Les couleurs sont fascinantes. Le bleu turquoise enrobe les massifs rocheux qui bordent l'île. La forêt est partout. Au milieu des arbres l'aéroport apparaît. Nous foulons enfin la reine des îles loyauté, Lifou.

Aussitôt arrivés, nous louons une petite twingo car l'île est gigantesque. Nous partons pour le sud et la plage de Luengoni. Nous rencontrons Bella notre hôtesse. Je n'ai qu'une hâte : découvrir cette plage dont tant nous ont parlé. Une nouvelle fois la nature semble avoir frôlé la perfection. Les arbres sont hauts et massifs, des blocs rocheux sont exposés au milieu de la baie bordée d'un sable blanc si fin qu'il faut y plonger les mains pour s'apercevoir de sa douceur.
Auparavant des tortues venaient mettre bas sur cette plage mais depuis quelques années l'activité humaine a mis fin à cette tranquillité nécessaire à leur reproduction. Néanmoins à la tombée de la nuit, les yeux rivés sur l'eau, une petite tête apparait. Je m'approche, et oui c'est bien une tortue. Elle se balade au bord, à seulement quelques mètres de mes pieds. Elle est rejointe par 3 puis 4 tortues. Comme des enfants nous tentons de saisir chaque image. Elles sont là et nous avons le privilège de les observer dans leur habitat naturel. En relisant mes lignes, je pense qu'il est possible que je passe pour un illuminé à écrire et encore écrire sur le moindre mouvement de ces animaux. Il y a quelque chose de magique à observer ces habitants du royaume des océans.

Le lendemain nous voilà partis pour la baie de Wadra. Entre les cocotiers, un bleu scintillant attire notre attention. Cette baie est petite et ressemble à un amphithéâtre. Les roches forment des tribunes qui descendent lentement à la surface de l'eau. Il n'y a personne et encore une fois nous en prenons plein les yeux. Malgré quelques tentatives avec masque et tuba les poissons ne sont pas au rendez-vous mais le lieu est unique...

Nous repartons vers le nord, en passant par Wé la ville principale de l'ile. Nous découvrons la laverie. Le bureau fait de planche de bois est vide. Il y a un petit carnet et un stylo sur la table.
Il faut laisser son linge, écrire son nom et laisser l'argent. C'est à la mode calédonienne : "Casse pas la tête". Un proverbe que répètent les Caldoches et les Kanaks pour se moquer de notre de vie occidentale.

Encore plus au Nord, nous découvrons la plage de Peng. Je pourrais encore vous décrire à quel point elle est belle mais vous pourriez croire que j'affabule tant les belles découvertes ne cessent de défiler devant nos yeux. Je resterai donc mystérieux sur celle-ci.

Au Nord-Est de l'île il y a une église qui surplombe la baie. Elle est blanche et rouge, le point de vue permet d'apprécier toutes les couleurs. Sur le chemin du retour une route s'écarte. Un panneau indique l'aquarium... Cette baie ressemble aux calanques de Marseille. La roche est noire. L'eau salée grignote le contour et forme un arc de cercle où des arbres difformes ont trouvé place. Il faut se mettre à l'eau pour découvrir toutes les merveilles que renferment ce lieu dont le seul nom appelle à ouvrir les yeux.
Je saute à l'eau et les habitants semblent aussi excités que moi. Les coraux ressemblent à un jardin japonais, les pierres laissent place à des bandes de sables blanc, c'est une exposition où les coraux sont rois. Les poissons ont envahi ce lieu magique. Il y a des calamars en pleine eau, un poulpe, des diodons. Le petit peuple de la mer habite là, à quelques mètres du bord. Ce lieu semble avoir été préservé. C'est une nouvelle rencontre avec la nature et sa beauté...

Nous partons ensuite à la rencontre de Janine et sa vanilleraie. Après un petite arrêt dans un des seuls restaurants de l'île, nous continuons au Nord-Ouest à la sortie du dernier village. Il faut marcher dans une petite forêt ombragée pour atteindre une habitation très simple.
Janine nous appelle. Elle nous dit bonjour très poliment. C'est ainsi que le plus naturellement du monde elle nous invite à prendre place sur les bouleaux de bois qui feront office de siège. Janine est une femme de 50/55 ans, des yeux noirs vifs et pétillants, elle bouge avec délicatesse, et elle ne cesse de nous observer. Elle nous présente sa vanilleraie, son histoire et laisse échapper un sourire communicatif. Sans la connaitre, elle est attachante. On pourrait l'écouter pendant des heures. Son mari était curé et il comprit très tôt que pour sauver son île il fallait la rendre indépendante économiquement.
Passionné par la nature il chercha des plantes à cultiver pour les exporter. La vanille de bourbon qui fut introduite par les missionnaires en 1860 disparue presque totalement sur Lifou mais Félix l'ancien curé chercha comment à nouveau cultiver cette plante. Après des années car il faut 5 ans pour obtenir une gousse il améliora ses connaissances et réussi à réimplanter cette culture perdue après le départ des missionnaires. Il forma ensuite les 500 cultivateurs des iles loyauté et créa la maison de la vanille à Lifou. Celle-ci permet à tous les producteurs d'exporter leur marchandise. Il devint monsieur vanille. Tout cela il le fit avec Janine gratuitement pour permettre aux kanaks de vivre dignement tout en restant sur leur île.
Les valeurs de partage sont encore très présentes dans le discours de Janine. Cette visite est gratuite et son seul plaisir est de partager et d'accueillir les voyageurs de passage. Nous visiterons ensuite son jardin verdoyant. Les gousses de vanilles sont partout et cela ressemble plus à de gros haricots verts qu'aux gousses noires que nous achetons. Nous restons émerveillés par la simplicité de cette femme, attachante, intéressante qui se bat depuis toujours pour les autres.
C'est comme si elle avait toujours cru devoir ce qu’elle donne, là ou tant d'autres ne donnent que pour recevoir. Un bel exemple de générosité pour une belle personnalité. Il faut apprendre de toutes ces rencontres et peut-être donner un peu aux gens qui passent, un sourire par exemple.

Janine et Félix accueillent depuis trente ans des voyageurs sans jamais avoir cessé de se battre pour leur idéal, une île ouverte sur le monde, indépendante, faite de partage et d'échange. Alors pourquoi ne pourrions-nous pas simplement donner un sourire une fois de temps en temps.
Allez voir Félix et Janine, vous verrez que donner peut rendre heureux.

Après cette belle rencontre, nous partons aux falaises de Jokin. Il faut descendre un escalier qui part en lambeaux pour voir naître ces falaises immenses. Le lieu est inamical et sauvage. On se sent minuscule face aux falaises. Il nous faut un moment pour apprécier les reliefs. Deux garçons plongent et semblent profiter de ce lieu captivant...

C'est déjà l'heure de partir et je vais continuer la fin du voyage seul. Les îles Fidji m'attendent, l'excitation commence à reprendre le dessus... Je quitte la Calédonie par la plus belle des îles : Lifou.
Encore une fois, il faudra revenir...

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